Au moment où le Sénégal a promulgué l’élection de 15 députés parmi la diaspora en vue d'un meilleur échange économique entre ces derniers et leur pays d'origine. Il semble que les fonds envoyés par les africains (vivant à l'extérieur) vers leurs nations d'origine constituent une voie royale vers l’autonomisation de ces territoires qui souffrent d'une véritable carence en termes de politique de développement. Actuellement en thèse sur ce sujet, Jean Michel Guiart qui travaille sur l'apport des camerounais de France vers l'ouest du pays, a accepté d'échanger avec l’équipe d'Arcare Concept sur son parcours. Écoutons ce natif de la Nouvelle Calédonie qui a remis au gout du jour la musique Reggae grâce à ses talents de DJ.
Pouvez-vous vous présenter à nos chers lectrices et lecteurs s'il vous plait?
Bonjour, je suis Jean Michel Guiart, je suis doctorant au laboratoire Migrinter à Poitiers.
Si vous deviez vous définir en 3 mots, que choisiriez-vous de nous dire et pourquoi ces qualités?
Je dirai :
- Posé du fait de mes origines insulaires probablement,
- Impartial parce que je suis constamment en quête d'objectivité,
- Curieux car j'aime discuter et débattre.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours?
J'ai un parcours digne d'un outsider. N'ayant pas été un élève des plus assidus je suis passé en 1 ère avec un contrat de travail, en terminale ( spécialité commerce) avec un contrat de travail et d'assiduité. Une année de Bac qui s'est soldée par une expulsion à six mois avant les épreuves. Ayant retrouvé un lycée de justesse (à trois mois avant le bac) j'ai obtenu mon diplôme en deuxième session. Attiré par l'économie et ses mécanismes sociaux dès mon plus jeune âge, je me suis orienté vers une licence d'économie et de gestion sur la Ville de Toulouse : une formation que j'ai abandonné au bout de quelques mois car je trouvais le programme trop axé sur les mathématiques. J'ai réitéré la même expérience qui s'est soldée par un abandon dans le cadre d'un Diplôme Universitaire Technologique mention Gestion des Entreprises et des Administrations.
Mon parcours universitaire amère (au début) m'a poussé à entamer le service civique orienté vers des missions d'économie sociale et solidaire (ESS) : s'étalant sur une année entière, j'ai eu l’opportunité de me confronter aux réalités sur le terrain. J'ai ensuite repris mes études à l'âge de 24 ans, naturellement dans le domaine de l'ESS. Après l'obtention de mes deux Masters (en ESS puis en Sociologie), j'ai entamé une thèse en 2017 sur les relations inter-ethniques et la migration internationale.
Pouvez-vous nous résumer le thème de votre sujet de thèse?
Mon sujet de recherche s'articule autour des " Pratiques transnationales des descendants de migrants et de la diaspora camerounaise, situés en France vers l'ouest du Cameroun : entre solidarité mécanique/organique selon l'ancrage culturel de l'individu". Cette thèse consiste à analyser et comparer l'existence de différentes visions ou leurs absences dans une logique de développement de l'ouest Bamiléké, chez les descendants de migrants ou la diaspora à travers leurs projets envisagés pour cette zone, par exemple via les transferts d'argent, de connaissances et l'envoi de matériels. La différence des visions se situe dans une démarche :
- inclusive vis-à-vis du collectif qui comprend dans sa globalité la communauté locale, la famille et les proches. Cette démarche sous-entend un mode opératoire rassemblant les forces vives au sein des coopératives ou des associations qui sont mieux adaptées au contexte car elles ont une fonction redistributive.
- individuelle à travers le modèle de la Start-Up, calquée sur des valeurs occidentales comme le culte du winner qui se traduit par des objectifs individualistes.
Et si vous nous parliez un peu de votre passion pour la musique?
Ma passion pour la musique me vient de mes proches qui m'ont fait découvrir le Reggae assez tôt. D'abord attiré par les sonorités et plus tard par le message que véhicule cette musique, je ne crois pas que j'aurai eu le même parcours si j'avais écouté un style de musique différent. J'ai découvert grâce à ce mouvement artistique tout un pan d'une culture presque inconnue par les jeunes de ma génération, il s'agit de la culture du " Voice of the poor" (qui se traduit par "la voix du pauvre''). Les messages conscients et engagés dénoncent le bilan social d'une population jamaïcaine livrée à elle-même. Ce style s'est ensuite propagé de Kingston à Soweto, diffusant ainsi la voix des sufferers (les opprimés) vivant dans les pays du Tiers Monde ainsi que les indigènes (les Indiens d'Amérique, les Papous etc) : un mouvement de revendication qui a fini par s'imposer comme une culture sur le continent américain et partout. Mes travaux de recherche sont largement influencés par les œuvres de Marcus "Mosiah" Garvey, puisqu'elles constituent, à mon sens, une des clefs si ce n'est la seule nécessaire au développement de l'Afrique : si on considère le fait que le transfert d'argent des migrants constitue une somme trois fois supérieure au budget de l'Aide Public au Développement en 2011, les pratiques transnationales peuvent effectivement susciter un social empowerment (autonomisation sociale) des territoires africains.
Nommé Natural Destiny Selekta sur scène je poursuis une carrière de DJ depuis mes premières années de fac. Ce nom est très significatif pour moi car je pars du constat que notre destin ne nous appartient plus. Il fut sciemment dessiné par cette "démocratie capitaliste", qui nous a conditionné afin de nous présenter le futur à travers l'essor de la technologie, comme l'unique forme de progrès, au détriment de la biosphère. C'est donc avec un certain plaisir que je véhicule cette musique révolutionnaire, à cause de sa faculté intrinsèque d'être un outil de conscientisation.
Quels sont vos projets sur le long terme?
Mes projets sont assez simples. J'espère trouver un travail en tant que chargé de mission dans le domaine de l'ESS qui contient au delà de l'aspect économique, une certaine logique fidèle à la mobilisation citoyenne, au développement local, ou encore à la gestion des communautés dans un rapport équitable.
Que pouvez conseiller aux jeunes générations pour atteindre leurs objectifs?
Il faut faire ce qu'on aime. Cela peut souvent prendre du temps pour trouver sa voie, mais le principal ce n'est pas le départ mais plutôt l'arrivée !
Pouvez-vous nous citer 3 bienfaits de l'entrepreneuriat pour l'Afrique?
Tout dépend du type d'activité exercée, mais de façon générale je citerai deux actions, à savoir :
- créer de l'emploi,
- être un acteur et non un spectateur du développement de sa localité.
Que pensez-vous de l'initiative Arcare Concept ?
Moi qui travaille sur des questions d'identité je trouve cela intéressant de mettre en avant cette dimension "afropéenne" . Elle permet de garder ce lien avec le continent tout en agissant en France. Dans un contexte de mondialisation on a tendance à cantonner l'identité à une localité. De ce fait, la France accuse un retard sociologique considérable sur ces questions dans le sens où l'on perçoit le communautarisme comme un outrage à l'identité nationale. D'ailleurs on préfère dire le mot "black" car connotation américaine plus positive (en référence aux chanteurs, sportifs ou acteurs américains) plutôt que "noire" pour qualifier un afro-descendant en France ( car il y a peu de personnalités à qui se référer en termes de modèle de réussite). Donc cette réappropriation identitaire et culturelle est positive parce qu'elle s'inscrit inéluctablement dans un contexte de post-modernité.
Soumaïla Kotié Diakité
Rédacteur en chef chez www.arcareconcept.com
Social Média Manager chez Concept 4'part
Diplômé en Master des Projets Numériques (Université Toulouse II)
Double Master Administration Générale et Territoriale (Université de Limoges)/ Management des Entreprises Sanitaires et Sociales (IAE de Limoges)
Votre Start-up de Communication
Téléphone : 06 65 57 09 87
E-mail : soumaila.diakite@gmail.com